Ce n'est pas une blague. Jean-Louis Maurette, un écrivain baroudeur breton, prépare une nouvelle expédition en Russie. Son espoir : être le premier à découvrir l'almasty, le yéti du Caucase.
Quand Jean-Louis Maurette, 58 ans, raconte qu'il recherche le yéti, il a du mal à être pris au sérieux. « Les gens, ça les amuse, pour eux, c'est comme les extraterrestres, ça n'existe pas ! », souritil. Mais pour cet écrivain baroudeur de Quimperlé (Finistère), à mille lieues de l'illuminé, c'est une quête palpitante et très réfléchie. Il revient d'une expédition d'un mois au Kazakhstan, après trois autres en Russie ces dernières années. Lui, chasse l'almasty, ou yéti du Caucase, qui ressemblerait à un grand primate velu bipède.
Mais, comme ses cousins de l'Himalaya (le yéti de Tintin) ou des forêts nord-américaines (le big foot), il demeure souvent une vaste blague aux yeux du public. Pourtant, depuis des décennies, les expéditions s'enchaînent.
Des explorateurs et des scientifiques chevronnés essaient de trouver sa trace, produisant des travaux solides dont certains ont reçu le soutien du paléontologue Yves Coppens. Beaucoup ont, dans ces montagnes reculées, récolté des témoignages d'habitants qui se recoupent. Les plus chanceux ont repéré des empreintes. Mais aucun n'a ramené une réalité indiscutable : un yéti mort ou vif. Résultat : ce singe d'environ 2 m, qui se déplace comme un homme, est renvoyé à l'état de mythe, alimentant sur la Toile fantasmes et vidéos bidonnées.
Jean-Louis, lui, y croit. « Au départ, j'étais très sceptique, j'avais des doutes. Mais plus je vais sur le terrain, plus ça se resserre. Ce qui me passionne, c'est qu'il y a un mystère », s'enthousiasme celui qui est aussi chasseur d'épaves. Il s'intéresse à cette énigme depuis près d'un demi-siècle.
Lors de ses pérégrinations à l'Est, il a mené l'enquête. Il a interrogé des bergers, des chasseurs qui ont aperçu « des choses bizarres », un inspecteur d'une réserve naturelle, des habitants assurant que leurs parents leur avaient confié avoir croisé la bête...
Sur place, la population n'est pas toujours bavarde. « Les témoins ont peur qu'on les prenne pour des fous. Mais quand ils parlent, c'est crédible. Ils connaissent bien la faune, ils ne vont pas confondre l'almasty avec un ours », estime cet ancien technicien spécialiste des viseurs de char laser. Lui-même a observé une trace suspecte de pas. Mais il n'est pas tombé nez à nez avec l'hominidé aux « poils sombres avec reflets roux ». « C'est un animal sans doute en voie de disparition, qui a une vie nocturne dans des régions qui se désertifient. Donc, forcément, les rencontres avec l'homme sont difficiles », analyse-t-il. Il ne craint pas cet hypothétique face-à- face avec un « animal tout en haut de la chaîne de l'intelligence et de l'évolution ». « Je l'attends. Ce qui me fait peur, ce sont les ours, pas le yéti », assure-t-il.
Il prépare déjà sa prochaine traque prévue cet été sur les crêtes du Caucase, en Russie, actuellement à l'affût de sponsors pour financer son immersion de trois mois. Cette fois, il voudrait pouvoir « monter une station d'étude », poser une vingtaine de pièges photo-vidéo et s'équiper d'une caméra de vision thermique pour tenter de débusquer la mystérieuse créature.
Le yéti, « l'abominable homme des neiges » de l'Himalaya, popularisé par les aventures de « Tintin au Tibet », paru en 1960, n'est pas une pure invention d'Hergé. Le célèbre dessinateur belge a en effet été inspiré par son compatriote et ami, le scientifique Bernard Heuvelmans. Les deux hommes se sont croisés dès 1942 dans les locaux du quotidien « le Soir ». Le zoologue, décédé en 2001, est l'un des pères fondateurs de la cryptozoologie, l'étude des animaux dont l'existence n'a pas été irréfutablement prouvée par la science. Celle-ci s'appuie sur des témoignages, des fossiles, des poils, des clichés...
Le docteur en zoologie a écrit la série de livres « Sur la piste des bêtes ignorées », qui s'est vendue à des centaines de milliers d'exemplaires. Ce savant a fourni à Hergé de la documentation sur le yéti pour la réalisation de son 20 e album. Dans l'imagination d'Hergé, le monstre des cimes, qui a fait l'objet de multiples expéditions au cours du XX e siècle, n'a rien d'une brute cruelle. Il est même doué de sentiments, puisqu'il se montre très humain quand il devient l'ange gardien de Tchang, rescapé d'un crash aérien.
Source : leparisien